Coup de cœur

Fin 1937 naît Françoise, sœur aînée de l’auteur. « Ni morte, ni vivante », son ombre plane sur la cellule familiale, elle est absente et présente à la fois. Françoise, touchée par une encéphalite convulsivante à dix mois, bouleverse les rêves de Lucienne, sa mère. Elle qui désirait tant fonder une famille pour retrouver un prestige perdu par les générations précédentes. Face aux crises d’épilepsie et à l’agressivité de sa fille qui n’est cliniquement pas malade, elle la place dans un couvent. Et quand la situation reste insupportable, elle demande au médecin de pratiquer sur elle une lobotomie. Françoise a alors 14 ans. Pascal Harlem, psychanalyste lacanien, reconstitue dans ce récit une histoire familiale sombre, un secret familial presque inavouable tant il mêle effroi et culpabilité. Au décès de la sœur en 2014, il cherche à comprendre un passé qui lui semblait encore bien confus, s’aidant des carnets que sa mère avait laissés. C’est autant l’histoire de Françoise, de son étrange présence, que celle de Lucienne, fille en manque d’attention devenue mère. La criture est parfois brutale, les phrases sont courtes, on perçoit toute la douleur que le narrateur cherche à endiguer pour pouvoir continuer à raconter cette histoire. Longtemps, il tient la mère loin de lui et la nomme seulement Lucienne, tout lien filial est évoqué avec une grande distance. Ce livre est l’aveu d’un frère désarmé, l’évocation d’un tabou et un deuil nécessaire bouleversant pour le lecteur.