Coup de cœur

Cette scène est présente dans l’esprit de tous les amoureux de Proust : la chambre du 44, rue Hamelin à Paris, la pièce centrale de l’appartement nouvellement investi par Marcel Proust. Et Henri Raczymow nous en montre l’intimité avec beaucoup de délicatesse. Désormais, Proust ne quitte presque plus son lit, depuis lequel il écrit avec une exigence jusqu’à atteindre la perfection toujours voulue. Malgré sa condition physique, il ne renonce ni aux dîners du Ritz qu’il fait livrer dans sa chambre, ni à la musique lors qu’il invite un quatuor à jouer dans son salon. Ses livres, religieusement conservés dans son boudoir, l’accompagnent en permanence lorsqu’il n’écrit pas. Ce sont ici les trois dernières années de la vie de l’auteur qui se déroulent, celles qui vont porter dans un dernier et douloureux effort l’accomplissement de la Recherche. Il faut aller vérifier tel ou tel détail dans Paris, revoir des pages pourtant achevées, et toutes ces manies sont possibles grâce à Céleste, sa domestique et amie. Elle devient comme une seconde mère pour l’auteur, et collecte les feuillets, rédige ce qu’il lui dicte, rend visite à son éditeur, Gaston Gallimard, pour soutenir Proust jusqu’à son dernier souffle. Raczymow est un grand connaisseur de la vie et de l’œuvre de Proust. Il nous plonge au cœur d’une vie grandiose qui s’achève sans hostilité ou regret. Privilégié-e-s, nous assistons au fabuleux processus de création, qui semble n’être complet que lorsque la mort arrive.