Coup de cœur

« J’aimerais mourir de mort naturelle. Je voudrais vieillir. Personne ne vieillit chez nous. Nous partons dans la fleur de l’âge ». Le roman d’Agnès Desarthe commence par un long monologue qui intrigue le lecteur. Puis on se retrouve dans une partie de chasse dont on pressent qu’elle ne sera pas tout à fait ordinaire. Sur la demande d’Emma qui voudrait que son compagnon s’intègre davantage à la vie du village, Tristan a accepté de rejoindre un groupe de chasseurs. La chasse lui est complètement étrangère, il n’en connaît ni les codes ni les usages. Il ne s’y sent pas à sa place et préférerait être ailleurs, d’autant que rien ne va se passer comme prévu. Le récit de la matinée est entrecoupé de flash-back sur la jeunesse de Tristan, son enfance auprès d’une mère malade, ses études en Angleterre, sa rencontre avec Emma et le retour du couple en France avec des projets plein la tête. L’adolescence et le passage à l’âge adulte sont des sujets chers à la romancière. Elle nous propose un récit initiatique qui tient à la fois de la fable philosophique et du conte. Perrault et Lewis Carroll ne sont jamais loin. Elle laisse aller sa plume sans se soucier de logique ni de principe de réalité tout en explorant des sujets graves et profonds sur la condition de l’homme confronté à lui-même et à une nature hostile. On se ballade entre drôlerie et humour, émotion et tragique. C’est un livre surprenant, profond et d’une très belle écriture dont on retiendra des dialogues savoureux. (A.P.)